En 2014, de passage à Paris alors que je poursuivais mes études à Aix-en-Provence, mes déambulations me mènent par hasard devant une boutique Tom Ford. J’ai toujours eu beaucoup de sympathie pour l’esthétique outrageusement 70’s de cette marque. Certes le rapport qualité/prix est objectivement absurde mais la flamboyance de ses costumes structurés, parés de revers en pique qui rappellent plus l’armure médiévale que la tenue de travail m’a toujours fasciné. Mais étrangement, ce qui m’a marqué ce jour-là, ce n’étaient pas les power suits ou autres vestes de cocktails moirées, mais… une série de robes de chambres ! Réalisées dans des soies tissées lourdes, avec un col châle généreux qui remontent haut sur la nuque, en enfiler une procurait une sensation étrange mêlant confort et boost incroyable à l’égo (qui certes, me concernant, n’en a décidément pas besoin…). Me voilà alors plongé dans une énième obsession : le homewear!

Mais l’étudiant d’alors n’avait absolument pas les moyens de sortir la somme à quatre chiffres exigées, fort heureusement puisque j’aurai pu être suffisamment stupide pour considérer un instant cet achat. La quête d’un substitut accessible était donc lancée. Une première étape fut atteinte lorsque la même année, je me suis procuré une vieille robe de chambre d’occasion, aux manches trop courtes et au tissu trop fin. Une part de moi ne pouvait exclure – et c’est bien le problème de l’occasion – qu’un octogénaire était mort nu dans ce vêtement.

Un achat inutile, frustrant.

Mais les obsessions ont la vie dure. Les recherches sont décourageantes : les robes de chambres sont devenues des produits de luxe, et mis à part celles en coton fin, elles sont vendues à prix d’or. Il n’est pas rare de voir celles en soie être vendues à plus de 1.000€, et rare sont ceux qui proposent plusieurs longueurs de manches. Contacter un chemisier alors ? Les prix sont trop élevés, évidemment, et la grande majorité ne proposent pas de soie.

Je finis par trouver un site. Villa Delmitia. Le site sent bon les internets des 90’s. C’est mal fait, c’est moche. Maiiiiiiiiiiiiis… Il propose des robes de chambre en soie, dont les mesures sont ajustables et à moins de 300€ ! Un doute persiste cependant.

Las de m’entendre geindre, ma compagne décide m’en offrir une.

Après quelques galères de communication avec l’atelier et des délais à rallonge, le produit arrive et est… satisfaisant. Pour le prix payé, il est difficile de critiquer. Mais tout de même, un détail me chagrine : la soie est très fine. Après deux, trois ans de port, voilà les coutures qui lâchent, la soie qui se déchire.

Adieu l’allure de lord anglais régnant sur son canapé ; Bonjour celle du clodo amélioré.

Google étant le meilleur ami de l’homme désespéré, je fini par trouver une alternative qui semble convenir à mes exigences: Baturina Homewear, une marque allemande spécialisée dans la robe de chambre et la smoking jacket et qui, pour 300 et quelques euros, utilise quelques soies de poids très raisonnable et du velours !

Par contre, ce qu’ils proposent n’est pas toujours du meilleur gout…

En naviguant sur le site, mon envie initiale se modifie : on murmurait que le second confinement pointait le bout de son vilain nez, et les températures sont moins clémentes en novembre qu’en mars. Je décide alors de partir sur un velours dans lequel je pourrais trainer pendant plusieurs semaines au chaud. Pour ne pas fermer la porte à la commande ultérieure d’une robe de chambre en soie, je préfère commander une smoking jacket.

Arrêtons-nous une seconde sur cette pièce, le nom portant à confusion. Nous appelons en France « Smoking » ce que les anglais appellent « Dinner suit » et les américains  » Tuxedo ». Mais les anglo-saxons utilisent « Smoking jacket » pour une autre pièce, celle qui est le sujet de cet article, qui n’est rien d’autre qu’une robe de chambre courte en velours, et dont l’utilité évidente était de pouvoir fumer tranquillement sans risquer de tacher – ou pire, bruler – sa tenue de soirée avec les cendres du tabac. Le velours absorbait les odeurs et encaissait les coups, son « poil » long pouvant être brossé.

Avec le temps, les aristocrates anglais voulaient une tenue de soirée plus courte pour diner sans s’assoir sur leur queue de pie, et la confusion fut entretenue à la fois par la linguistique, plusieurs langues utilisant à tort Smoking pour Dinner, et à la fois parce que certains ont commencé à commander à leurs tailleurs des Dinner Jacket faite… de velours… (j’aime, peut-être à tort, appeler cela des vestes de cocktail). Les américains entrent alors dans le bal, commençant à faire des Tuxedo à col châle (comme les robes de chambre), alors plus personne n’y comprenait rien et la confusion règne encore aujourd’hui.

Quid? Dinner Jacket ou Smoking Jacket? A mon sens, ce mélange hybride (Ardentes Clipei) relève d’une autre catégorie d’eveningwear.

Reste que la smoking jacket, qu’elle soit à ceinture ou à brandebourg, est à la base est une veste purement déstructurée, et est l’un des piliers de l’Homewear, aux côtés de la Robe de Chambre et du Pyjama.

Revenant à Baturina et ma smoking jacket. La marque ne vend qu’à la commande. Il s’agit donc de MTO ou de MTM. Elle permet en effet avec un nombre limité de mesure de faire n’importe quelle pièce. Retenez bien qu’il s’agit encore une fois d’une pièce large, déstructurée, et où la précision de la coupe n’est pas une priorité. Mais pour les gens qui – comme moi – ont les bras longs, c’est bien pratique !

La commande fut expédiée en deux semaines, livraison rapide, et le produit bien emballé. Un bon point donc, pour le service à ce stade. Le velours est de qualité, lourd, fluide et chaud. L’intérieur est doublé de soie pour le confort et les finitions sont tout à fait raisonnables.

Cependant, grosse déception au déballage, le col a été fait de velours alors que je l’avais demandé en soie. Le service client m’a proposé un retour ou une remise, mais n’a jamais donné suite à ma demande de renvoi…Je n’ai pas insisté, étant tombé amoureux de la veste entre temps.

Car oui : j’ai passé mon second confinement dans cette veste. C’est à peine si je ne dors pas avec. C’est confortable, c’est beau, c’est chaud. Seul reproche : la veste n’ayant réellement aucune structure, le col châle peut souvent présenter des plis, le velours étant un tissu très mou. Pour une fois dans ma vie, je n’aurai pas craché sur un peu de thermocollant. Je pense que le revers de soie gros-grain demandé aurait eu une meilleure tenue, mais tant pis.

Ce manquement du service client m’aurait normalement énervé. Et pourtant, force est de constater que je m’amuse régulièrement à configurer sur leur site une potentielle commande de robe de chambre…

Sur ce.

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