La quête d’un style personnel se fait par étapes. On tâtonne, on essaye, et évidemment on se plante.On commence souvent par se construire un style par mimétisme, on voit, alors on copie. Et puis, les goûts s’affirment petit à petit, alors on ose. On le fait parfois par goût, parfois par volonté de se différencier. Est-ce un mal en soi?

Tab collar par Francesco Merolla

Je suis quelqu’un d’assez obsessionnel. Lorsque quelque chose me plait, cela prend des proportions qui frôlent le ridicule. Et la chemise est un terreau fertile pour mes obessions.

Pourtant, c’est un vêtement qui ne m’intéresse que peu. Pour ainsi dire, je me fiche royalement de sa coupe. Tant qu’elle n’est pas trop slim, qu’elle ne me colle pas à la peau, en me boudinant et tirant sur chaque boutonnière, cela me va. Si elle est ajustée, soit. Si elle flotte, soit. Qu’importe. De toute façon, je porte une veste.

En cela, la chemise est à la frontière du sous-vêtement. N’est-ce pas d’ailleurs quelque chose que j’ai lu il y a des années sur Stiff Collar, l’excellent blog de Julien Scavini? Je ne suis pas un fan de sa demi-mesure, je ne m’étendrai pas sur le sujet (l’offre pantalons en prêt à porter est cependant pas mal). Mais j’ai toujours apprécié l’approche historique de son blog.

Non, ce qui est important pour moi dans une chemise, c’est le col et les poignets. Voilà le catalyseur de mes obsessions. Voilà les éléments que je vais utiliser pour affiner mon style personnel grâce à mon coté monomaniaque.

C’est simple: je ne porte que deux types de col, et un seul de poignets.

Le Tab Collar

Tab Collar par Courtot

Il arrive fréquemment que les chemisiers français le nomment « col anglais ». Soit. Mais je hais ces appellations géographiques qui, comme nous le verrons plus tard, ne font pas toujours sens.

Il s’agit là d’un col assez formel, guindé, mais qui sublime la cravate grâce à sa patte boutonnée qui lie les deux du col. Cette patte, c’est le fameux Tab, ou Kirby comme j’ai pu parfois l’entendre. C’est mon col de prédilection lorsque je suis en costume complet, même si je l’utilise parfois à contre emploi dans des dépareillés. C’est un col qu’il faut assumer, qui reste discret pour le profane, mais qui dénote immédiatement pour l’amateur.

Certes c’est vain, mais je l’avoue bien volontiers: je suis vain.

Edward Sexton

La difficulté reste d’en trouver de bien proportionnés. La plupart des marques de prêt à porter et de demi-mesure ne propose que des Tab Collar minuscules. Edward Sexton en propose des magnifiques, mais à un prix ridicule pour du pàp. J’ai eu quelques expériences heureuses en grande mesure chez Courtot, Lucca et Francesco Merolla.

Le Button-Down Collar

Button Down par Courtot

Je vous le disais dans le précédent article: j’ai quelques influences preppy. Or s’il y a bien un élément central dans ce style, c’est évidemment la chemise Oxford Cloth Button Down.

Et pourtant… je la haïssais! Tant d’années passé à haïr mes camarades de collège et de lycée habillés de la tête aux pieds en Ralph Lauren. Les mocs mous à picot, les polos pastels avec col relevé. Cette satanée broderie sur le torse de l’OCBD.

Qui plus est, les cols étaient encore une fois minuscules, et comble pour de l’OCBD: sans roulé. Or c’est précisément cela qui est beau dans ce col, un roulé de pointe bien généreux partant d’un pied de col bien haut. C’est ce qui permet à ce col de convenir aussi bien au port avec ou sans cravate!

Le poignet cocktail

Poignet cocktail sur chemise de smoking Courtot
Photo prise par Guillaume Brunet au mariage de @G_Tandre

On touche ici à l’une de mes plus grandes obsessions. J’ai longtemps eu un dilemme entre le poignet simple et le mousquetaire. J’aimais le revers de poignet du dernier, mais goûtait peu aux boutons de manchettes, souvent ostentatoires, et ce poignet ne correspondait pas au port du dépareillé.

Le poignet cocktail est donc apparu comme une évidence. Un poignet rare, qui flatte ma vanité, polyvalent, et qui me permet d’avoir une continuité dans toutes mes chemises.

Le nom m’échappe…

Certains chemisiers, pour une raison qui me dépasse complément, le nomme « poignet napolitain ». Pourquoi? Je n’en sais rien. Même les italiens n’utilisent pas ce terme. Le poignet cocktail est définitivement anglais. Certain disent qu’il a été crée par Turnbull & Asser, d’autres par Frank Foster, d’aucuns affirment que l’un ou l’autre l’ont fait pour Sean Connery et les premiers Bonds. Mythe ou réalité, peu importe, c’est un poignet pratique, beau, et encore une fois, d’une relative discrétion.

Le reste?

Le reste m’importe peu. Quelques préférences, mais rien de tranché. Oui, j’aime l’épaule froncée, les gorges simples sur mes chemises avec tab, américaines avec mes button down, et encore pas toujours. Oui, j’aime autant les matières texturé, les oxfords, flanelles, piqués et autre giro inglese autant que je hais la popeline. Non, je ne fais pas broder mes initiales. Peut être prendrai-je cette habitude si l’alzheimer frappe avant le cancer, mais en attendant, je connais mon nom.

Et vous? Quelles sont vos obsessions en matière de Chemise?

Sur ce.

10 commentaires sur « La chemise et mes obsessions »

  1. Très inspirant !
    J’aime définitivement tes goûts en matière de col ! Les cols plus ouverts aussi:jamais de cols italiens ? Parce que trop vus ?
    Et le col cubain: difficile avec une veste ou à tenter ?
    La priorité pour moi est sur la matière, une coupe correcte bien sûr et le col
    Au final je pense que l’on peut bien s’amuser avec les cols tant qu’on garde des proportions correctes et cohérentes entre la taille du visage, du col, des revers et du noeud 🤔
    Bonne journée !

    Aimé par 1 personne

    1. Il me reste quelques cols italiens fait il y a quelques années. J’apprécie, et il m’arrive d’en voir des magnifiques, mais j’ai simplement une préférence dans ces cas là pour les Tabs et n’en commande donc pas.
      Intéressant les cubains, j’en ai deux, j’apprécie cette tendance, mais je ne souhaite pas en prendre trop, tôt ou tard on s’en lassera.

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  2. Très fan du tab (que je ne porte pas souvent car je porte peu de tenues formelles), hyper fan de l’OCBD (Luxire en fait un très beau mais je te rejoins sur la médiocrité de leur SAV). Un peu réservé sur le poignet cocktail (que je trouve ni mousquetaire ni simple et le ni-ni n’est pas très convaincant dernièrement). Mais s’il y a bien un point sur lequel on se rejoint c’est la haine de la popeline !

    Aimé par 1 personne

  3. Merci pour le papier.

    Mon obsession, après avoir dépensé des sommes folles dans des chemises de PAP notamment chez Marol et G. Inglese, est de trouver des chemises de qualité décente -col suffisamment long et coupe pas trop cintrée- pour une centaine d’euros.
    C’est une gageure…

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    1. Voilà une quête bien courageuse!
      C’est vrai que je ne vois pas grand chose dans cette gamme. Je ne peux pas tester beaucoup de marques à cause de mon bras trop long. La gamme suitsupply a 99€ est pas mal mais peu de choix. On m’a dit le plus grand bien des Poszetkas, et Kamakura fait des choses pas mal, mais l’import est simplement chiant.

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      1. Merci.
        Je ne sais pas si ma quête est courageuses mais la chemise est une pièce qui ne dure que quelques années…J’essaie donc de me raisonner.
        J’ai effectivement une chemise de la gamme à 99€ de chez Suit Supply et j’en suis très content.
        Je ne connaissais pas du tout Kamakura et cela me semble très bien.
        J’ai déjà entendu parler de Poszetkas, je vais me laisser tenter.

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      2. Concernant la durée de vie… oui. Il y a un côté éphémère aux chemises. Après cela ne doit pas forcément être un frein à la commande en grande mesure, puisque ce qui s’abîme, ce sont justement les cols et poignets, ce que les chemisiers bespoke peuvent remplacer.

        Après c’est certain qu’il vaut mieux déjà posséder un certain nombre de chemises histoire d’en limiter le port en alternant et donc augmenter artificiellement la durée de vie.
        D’où l’intérêt de votre quête!

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  4. Excellent article. Y a un traitement particulier sur le col de la Button Down pour avoir une telle tenue comme ça ?
    Je précise que je ne suis pas dans le sartorial.
    Mes obsessions en matière de chemise : la coupe (primordial), la longueur des manches et longueur totale. J’ai un rapport conflictuel avec elle à tel point que j’en ai / porte très peu. Quand un modèle me plaît, ça paraît bien sur le papier mais une fois portée le rendu est souvent pas terrible. Donc forcément à force d’essayages et de renvois j’en arrive presque à détester ce vêtement que j’aimerais tant apprivoiser.
    Enfin voilà quoi. Très content de ton idée d’ouvrir un blog. C’est un plaisir de te lire et de voir tes tenues décryptées.

    Aimé par 1 personne

    1. J’insiste auprès de mes chemisiers pour que le pied de col soit rigide, mais que le col soit souple. Couplé au fait que je demande un pied de col haut (5cm), cela fait que le col boutonné reste toujours en place! Encore faut il apprécier les cols haut.

      C’est sûr qu’autant en sarto, la longueur de la chemise est un no-brainer (toujours plus looooooong), autant dans la plupart des autres styles, ça va faire ou fausser complètement la silhouette. Je suis bien soulagé de ne pas avoir à y penser!

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  5. Je partage ton obsession pour les OCBD, mais j’ai l’impression que pour en avoir une « authentique » (entendons nous : une qui n’a pas un col riquiqui), j’ai l’impression qu’il faut débourser au moins 150e (Gitman, Drake’s, BB…)

    Tu as des recommandations à des prix abordables ?

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